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Principe de non-identité
"Des mots, des mots, des mots."
— William Shakespeare, Hamlet, Acte II Scène 2.

"Les mots sont, bien sûr, la plus puissante des drogues de l'Humanité."
— Rudyard Kipling, Speech, Feb. 1923.

"Words express neither objects nor ourselves."
— Johann Wolfgang Von Goethe (1749–1832), German poet, dramatist. Sayings in Prose (posthumous).

"Une carte n'est pas le territoire qu'elle représente."
— Alfred Korzybski, Science and Sanity, International non-Aristotelian Library (1933).


Le principe de non-identité est d'une trompeuse simplicité: il établit que deux choses quelconques ne peuvent en aucun cas être identiques sous tous les aspects. Il y a forcément des différences qu'il peut être plus ou moins difficile de déceler.

Un corollaire de ce principe est que les mots que nous employons pour parler d'une chose ne sont pas cette chose: une carte n'est pas le territoire qu'elle représente.

Lorsque nous disons « Ceci est un crayon », nous estompons les différences entre 'crayon1', que nous pouvons toucher, sentir, utiliser, etc., et un crayon quelconque. Ainsi, la structure aristotélicienne de notre langage nous pousse à négliger les différences. Sur la foi de l'étiquette que nous plaquons sur les objets, il nous est alors facile de généraliser, en oubliant que cette généralisation ne concerne que des étiquettes qui ne sont pas les choses dont nous parlons. Nous appellerons cette réaction sémantique 'identification'.

Si nous disons, par exemple, « L'homme est un animal », le comportement des animaux doit servir d'exemple pour l'homme, entraînant l'application de la soi-disant 'loi de la jungle', de la 'loi du plus fort' et du 'chacun pour soi' dans les affaires humaines.

Et le mot 'chien' ? Le nombre d'individus que chacun connaît directement est forcément limité, et faible d'ordinaire. Imaginons quelqu'un qui n'a eu affaire qu'à des 'chiens' bien gentils, dont aucun ne l'a jamais mordu. Ensuite, il voit un animal quelconque; il dit «C'est un chien»; ses associations (relations) n'évoquent nulle morsure; il s'approche de l'animal, joue avec lui, et se fait mordre. L'assertion «C'est un chien» était-elle sûre? Bien sûr que non. Il a approché l'animal avec les attentes sémantiques et l'évaluation de sa définition verbale, mais il a été mordu par le niveau objectif non-verbal, in-dicible, qui a d'autres caractéristiques.
Science et Sanité, p. 373
Pour lutter contre cette orientation et rétablir l'ordre naturel d'évaluation, la sémantique générale nous propose le Différentiel Structurel, visualisant la distinction entre les niveaux d'abstraction, et les procédés extensionnels:

 Erreurs typiques sur la non-identité 

Une erreur traditionnelle, que font même certaines personnes entraînées en sémantique générale, est de citer la première premisse comme étant "la carte n'est pas le territoire." Cette proposition est symétrique: si la carte n'est pas le territoire, alors le territoire n'est pas la carte. Comme ce type de relation est pris en compte par le système aristotélicien, il est très difficile de comprendre comment une premisse symétrique comme celle-ci pourrait être la base d'un système non-aristotélicien. La prémisse correcte dit "une carte n'est pas le territoire qu'elle représente". Si la carte représente le territoire, le territoire ne représente pas la carte, une relation asymétrique.

Une deuxième erreur, de débutants cette fois, est de confondre "identifier (sg)" avec "reconnaître (sens courant)." Un bon moyen d'éviter cette erreur est de remplacer "identifier" par "reconnaître" et de voir si votre formulation tient est toujours valide. Bien sûr, la sémantique générale ne préconise pas de ne plus reconnaître les objets familiers pour arriver à la sanité, tout le contraire en fait: ça ressemblerait plutôt à la maladie d'Alzheimer. Pour plus de détails lisez L'Identification, en sémantique générale.

En conséquence de qui vient d'être dit, certains sont tentés de parler de "mauvaise identification" ("identifier (sg)") et de "bonne identification" ("reconnaître"). Une fois que l'on a compris les explications ci-dessus, l'identification (sg) reste comme une caractéristique indésirable et évitable de nos réactions semantiques.

Enfin, certains confondent (identifient) deux sens du mot "projection": l'un consiste à projeter ses croyances à l'extérieur de sa peau, comme pour un paranoïaque, ou de croire que la 'verdeur' se trouve dans les feuilles par exemple (une confusion typique de niveaux d'abstraction, une identification dans le vocabulaire de la sémantique générale), et le second est un mécanisme de survie de notre système nerveux, câblé dès le plus jeune âge, qui reconstruit un espace-temps quadri-dimensionnel à partir de nos perceptions, un mécanisme qui est 'parfaitement normal' même s'il peut avoir des limitations comme par exemple dans le cas des soi-disant illusions d''optique'.


© ESGS, 2002.