Home

Principe de non-toutité
"Dans la mesure où les lois mathématiques ont à voir avec la réalité, elles ne sont pas certaines, et dans la mesure où elles sont certaines, elles n'ont rien à voir avec la réalité."
— Albert Einstein, La géométrie et l'expérience, p. 3 (1941).

"Le doute est un état mental désagréable, mais la certitude est ridicule."
— Voltaire, Lettre à Fréderic le Grand, 1767.

"Une croyance religieuse diffère d'une théorie scientifique en ce qu'elle prétend contenir une vérité éternelle et absolûment certaine, alors que la science est toujours provisoire, s'attendant à ce que des modifications des théories actuelles s'avèrent nécessaires tôt ou tard, et consciente de ce que sa méthode est telle qu'il est logiquement impossible d'arriver à une démonstration finale et complète."
— Bertrand Russell, Grounds of Conflict, Religion and Science, Oxford University Press (1935).

"La seule certitude, c'est que rien n'est certain."
— Pline l'Ancien, Historia Naturalis, Livre 2, ch. 7.

"Une carte ne recouvre pas tout le territoire."
— Alfred Korzybski, Science and Sanity, International non-Aristotelian Library (1933).


Dans l'entraînement à la sémantique générale, l'élimination de la toutité constitue la première étape, avant même de pouvoir procéder à la suppression de l'identification.

La non-toutité est intimement liée à la conscience d'abstraire. Sur le Différentiel Structurel, la non-toutité est représentée par la présence de 'trous' non reliés au niveau suivant, conséquence directe du processus d'abstraction. Si vous prenez conscience des caractéristiques non-abstraites, il devient impossible de croire qu'une formulation, ou un ensemble de formulations puisse représenter totalement la chose auquel elles font référence.

Prenez un objet usuel, par exemple un stylo, et essayez de le décrire totalement, c'est-à-dire jusqu'à ce qu'il devienne impossible de rajouter une seule affirmation supplémentaire se rapportant à cet objet. Quand vous aurez terminé, posez-vous la question "Ai-je tout dit ?". Si vous le pensez, un séminaire de sémantique générale vous apportera quelques surprises !

 Erreurs typiques sur la non-toutité 

Lorsque nous réalisons que nous ne serons jamais capables de tout dire à propos de quoi que ce soit, première étape pour éliminer l'identification de notre système d'evaluation, cette évaluation peut conduire à la fausse impression que nous ne savons plus ce que 'sont' les choses, alors qu'elle signifie seulement que nous ne pouvons pas dire ce qu'elles sont. Cette impression est fausse car nous n'avons pas besoin de mots pour savoir ce que les choses 'sont', et certains termes sont mêmes non-définis, c'est-à-dire que nous savons ce qu'ils signifient mais que nous ne pouvons pas les définir en termes plus simples, à un instant donné (i.e. comme le nombre de mots d'un dictionnaire est fini, il y a un moment ou aucun terme plus simple ne reste, étant donné qu'une définition circulaire ne permet pas d'expliquer les significations d'un terme).

Sur la base de cette erreur, certains ont critiqués la non-toutité en tant que principe général, en croyant qu'il était auto-contradictoire et qu'il impliquait une surprécision que nous serions incapables d'atteindre. C'est le contraire, en fait: en appliquant la non-toutité, nous savons qu'une tentative de tout dire à propos de quoi que ce soit est vouée à l'échec, donc nous devons nous souvenir que nous n'avons pas tout dit et nous cessons ainsi d'essayer d'atteindre une impossible surprécision. Cette erreur est souvent faite par les lecteurs négligents qui confondent "sémantique générale" avec "sémantique" et ceux qui croient que la sémantique générale parle seulement de communication 'claire', tombant ainsi dans le piège de la toutité que nous sommes supposés éviter. Une certaine 'clarté' dans certains aspects de la communication est certainement recommendable, mais certainement inutile dans d'autres (poésie, langage amoureux, etc.). Rappelons-nous que la sémantique générale en tant que système général s'applique à 'toutes' les activités humaines, ainsi que le faisait l'ancien système aristotélicien.

Une autre erreur tirée par les cheveux, faite par les tenants du 'postmodernisme', est de comparer la non-toutité au Théorème d'Incomplétude de Gödel's et/ou au Principe d'Incertitude d'Heisenberg. Ceux qui utilisent ces théorèmes comme 'confirmant' la sémantique générale ne peuvent habituellement même pas les citer correctement. Ces théorèmes on des applications limitées et ne fonctionnent que dans un contexte précis. Les sortir de ce contexte et prétendre qu'il peuvent être appliqués dans la vie courante est une bourde du genre de celles dénoncées dans le livre de Sokal et Bricmont Impostures Intellectuelles.


© ESGS, 2002.